Pour sa deuxième édition, le festival Transforme présente douze spectacles pluridisciplinaires et un dispositif itinérant sélectionnés par la Fondation d’entreprise Hermès et ses quatre partenaires : le Théâtre de la Cité internationale à Paris, La Comédie de Clermont-Ferrand, les SUBS à Lyon et le Théâtre National de Bretagne à Rennes. Alliant exigence et accessibilité, la programmation de Transforme se déploie entre ces quatre structures, avec le soutien de la Fondation qui accompagne en outre certains artistes dans le cadre d’une aide à la création.
Des spectacles en prise avec le monde contemporain
Cette programmation se distingue tant par la transversalité des formes proposées que par les enjeux sociétaux qui y sont abordés dans des registres très variés. À commencer par le détournement d’une pratique sportive collective dans Derby, mis en scène par la compagnie UNA dans une version engagée et féministe. Tout aussi énergique, la nouvelle création bouillonnante d’Euripides Laskaridis, Lapis Lazuli, explore la figure du loup-garou au carrefour de la danse, des arts visuels et du burlesque, dont le pendant tragique pourrait être le Boudoir de Steven Cohen, dans lequel la densité et la métamorphose confinent au politique.
Le politique, de fait, se déploie en filigrane dans plusieurs spectacles, en interrogeant par exemple la manière dont nous vivons ensemble dans ce monde pluriel. Entre fiction et réalité, entre théâtre et virtuel, Marion Siéfert, dans _jeanne_dark_ met en scène les affres d’une adolescente d’aujourd’hui qui, en quête d’émancipation, se confronte en live au regard des autres. Dans un registre documentaire, les protagonistes de Radio Live – La Relève d’Aurélie Charon et Amélie Bonnin partagent avec spontanéité leurs expériences et leurs espoirs, en direct entre le plateau et leurs réalités parfois très éloignées. Théo Mercier, lui, nous immerge dans une dystopie spectaculaire : Skinless s’inscrit dans des décombres monumentaux, façonnant l’allégorie poignante d’une histoire d’amour impossible. Quel monde souhaitons-nous transmettre aux générations futures ? Cette question sociétale redoutable est au cœur du spectacle Memory of Mankind de Marcus Lindeen et Marianne Ségol, tandis que celle de notre rapport aux défunts, tout aussi vertigineuse, anime Les Corps incorruptibles d’Aurélia Lüscher dans un approche plastique et théâtrale où s’entremêlent le réel et l’imaginaire.
Face à ce qui nous dépasse, d’aucuns choisissent de s’engager avec les outils de la création et des nouvelles technologies, en s’inspirant du hacking conçu comme une pratique positive d’enrichissement mutuel, tel que le fait NSDOS avec son projet DDOS. D’autres imaginent des fables extravagantes, comme Les Chats ou ceux qui frappent et ceux qui sont frappés de Marlène Saldana & Jonathan Drillet, qui aboutit à un huis-clos fantasmagorique mâtiné de music-hall. D’autres encore se tournent vers la lumière, à l’image de Vania Vaneau qui, dans Heliosfera, flirte avec l’intangible pour une chorégraphie proche du rituel. À l’opposé, mais dans un geste tout aussi radical, Romeo Castellucci met en scène l’incommensurable solitude d’une reine, Bérénice, transfigurée par Isabelle Huppert, incarnation même du théâtre. Chacun, à sa manière, repousse toujours plus loin les limites de la création.
Une édition augmentée par la programmation de l’UMAA
Animée, elle aussi, par ce désir d’ouverture aux possibles, la chorégraphe Olivia Grandville propose l’Unité Mobile d’Action Artistique (UMAA) : cette structure gonflable de plusieurs bulles, modulable en fonction des besoins, a vocation à s’implanter dans les différentes villes-étapes de Transforme. Elle accueille ainsi des expositions, spectacles, fêtes, séances de travail ou rencontres, telle une agora. Sans cesse réinventé au fil de son itinérance, ce dispositif protéiforme revendique, à l’image de la finesse de sa toile, une porosité entre l’intérieur et l’extérieur, entre les artistes et le public, entre le lieu de création et l’espace public.
« Pour aller plus loin » avec les artistes
Avec cette deuxième édition, Transforme poursuit son objectif de mettre en mouvement aussi bien les artistes que les spectateurs, invités à « aller plus loin » dans l’appréhension des œuvres. Chaque théâtre partenaire déploie en effet un volet d’actions afin que les artistes puissent rencontrer autrement les publics, en les accompagnant par exemple dans les territoires. Par ailleurs, des dispositifs d’inclusivité sont proposés à l’intention des spectateurs en situation de handicap, parallèlement à des temps forts dédiés aux jeunes générations.
En fonction de ses affinités, chacun est chaleureusement invité à transformer son regard sur le monde.