Au cœur de notre époque placée sous le signe du numérique et de l’immatériel, il est des artistes qui se démarquent par leur attachement aux processus industriels traditionnels et aux documents imprimés. L’artiste, graveur et designer graphique Irfan Hendrian, né en 1987 aux États-Unis, est l’un d’eux. Invité à exposer à Aloft at Hermès, il nous propose d’explorer les conséquences des progrès technologiques sur notre relation au papier, en invoquant, en guise de titre, “Some Other Matter”, soit “une autre matière”.
Bienvenue, ainsi, dans un espace aux allures de bâtiment désaffecté où le papier donne l’illusion de la brique ou du béton, voire crée une boucle avec sa matière d’origine : le bois. “Je souhaite présenter le papier comme un matériau différent inscrit dans un processus industriel, explique l’artiste, vu comme une matière en volume, lourde et solide, à l’encontre de ses supposées caractéristiques. Il s’agit de repenser notre relation avec le matériau, notre interaction quotidienne avec lui et ses effets sur l’histoire et la nature, pour l’imprégner, in fine, de nouveaux souvenirs, sens et valeurs.”
C’est donc une installation globale, aux accents post-industriels, dans laquelle le visiteur pénètre en entrant à Aloft at Hermès. Des machines, des outils abandonnés, des éléments structurels sont reproduits en papier, comme un hommage aux maisons d’édition de Bandung, en Indonésie, où l’artiste est installé. Tombées en désuétude, celles-ci témoignaient autrefois d’une importante tradition d’impression industrielle.
En imposant le papier comme matériau de construction, Irfan Hendrian montre combien celui-ci peut endosser une force et une solidité inédites à rebours de sa matérialité classique. Il offre dès lors une multitude de possibles, qui renouvellent notre regard sur cette matière. Familier des explorations formelles, l’artiste déploie à Aloft at Hermès une démarche qui n’est pas sans rappeler le Bauhaus : réduire, simplifier les formes, aller à l’essentiel pour toucher au sublime.