Suite à l’exposition “Spektrum” présentée à Bruxelles en 2024, Reiko Setsuda a invité Joël Riff à imaginer à Tokyo un projet à quatre mains, “Spektrum Spektrum”, faisant littéralement résonner la proposition initiale. Ce “commissariat augmenté” constitue le premier temps fort de la dynamique curatoriale transversale que la commissaire du Forum souhaite déployer dans sa programmation.
Propice à un large spectre de signifiants possibles – des apparitions fantomatiques à un ensemble d’éléments de même nature, en passant par des phénomènes physiques –, le titre de cette exposition assume, via la répétition, les multiples jeux de miroir qui se déploient parmi les œuvres réunies par les deux commissaires.
La peinture d’Emmanuelle Castellan (née en 1976 en France) est peuplée d’espaces reconstruits, de superpositions et de silhouettes aux contours évanescents. À ses côtés, l’asymétrie du céramiste Johannes Nagel (né en 1979 en Allemagne) et les tableaux énigmatiques de Walter Sennen (né en 1946 en Belgique) ajoutent une couche de mystère et de complexité à cette exposition volontairement ambivalente. Les trois artistes, déjà présentés à La Verrière, dialoguent au Forum avec trois plasticiens japonais. Structurant l’espace, les cadrages de Michiko Tsuda (née en 1980) jouent avec les illusions, la perspective et la perception du spectateur. Les formes spectrales photographiées avec humour par Motoyuki Daifu (né en 1985) et les sculptures d’inspiration biomorphique de Kentaro Kawabata (né en 1976) complètent les multiples significations et nuances de cette exposition collective.
En contrepoint, deux tableaux de Marie Laurencin (1883-1956), l’un emprunté à une galerie tokyoïte, l’autre provenant de Paris, s’inscrivent dans un entre-deux, entre réalité et fiction. Dans leurs motifs comme dans leur palette, ces toiles exceptionnelles à la présence fantomatique font écho, par-delà les époques, avec les pièces réunies au Forum : “Spektrum Spektrum“ donc.