Lancé en 2010, ce programme de Résidences débute une nouvelle session dans le cadre de son troisième cycle. Comme l’année passée, les artistes Michel Blazy, Isabelle Cornaro et Françoise Pétrovitch accompagnent les trois plasticiens en qualité de parrains, pour les aiguiller dans ce programme ouvert à tous les possibles.
Née à Taïwan en 1980, Yuhsin U Chang explore les formes et la poétique du vivant à travers des matériaux bruts (poussière, laine, lin, bois…) façonnés dans un langage sculptural. C’est dans une approche semblable qu’elle aborde le cuir au sein de la Manufacture de Haute-Maroquinerie, fascinée par le parcours de cette matière entre les mains des artisans. Comment le cuir souple devient-il rigide ? Comment les gestes et les savoir-faire suffisent-ils à créer la forme ? Pliage, astiquage, lissage, polissage… : l’artiste parrainée par Michel Blazy s’empare de la multiplicité des techniques artisanales pour dresser de grandes pièces de cuir à l’échelle d’une demi-peau et les faire tenir debout sans armature. Au nombre de six, ces mystérieuses créatures de cuir, qui empruntent autant à l’animal qu’au végétal, s’organisent comme un troupeau immobile.
Parrainé par Isabelle Cornaro, Guillaume Dénervaud délaisse a priori sa technique de dessin pour s’immerger dans les savoir-faire ancestraux de la Cristallerie Saint-Louis et créer une constellation de vingt sphères suspendues en cristal rouge. Le jeune plasticien, né en Suisse en 1987, envisage cette installation inspirée de la science-fiction comme une alerte rouge dénonçant les impacts de l’activité humaine sur notre planète. Une fois soufflées, les sphères ont été taillées et incisées puis sablées pour apparaître accidentées, rongées voire trouées, semblables à des vestiges archéologiques. La technique du sablage lui permet de créer des motifs en convoquant sa pratique du dessin. Elle renvoie par ailleurs à la composition même du cristal, qui n’existerait pas sans sable. Volontairement imparfaites, ces formes endossent un statut ambigu, entre cellules agrandies, planètes miniatures ou formes rescapées d’une époque qui courrait à sa perte.
Accueilli à la Holding Textile Hermès, Guillaume Poulain est parrainé par Françoise Pétrovitch. Familier des détournements et des changements d’échelles qui confèrent une efficacité redoutable à ses installations, le plasticien français, né en 1972, a multiplié les expériences dans le cadre de sa résidence pour aboutir à plusieurs projets. Se frottant aux savoir-faire du tissage aux côtés des artisans, il a créé plusieurs tissus qui revisitent torchons, draps et autres écharpes de foot destinés à constituer une collection hybride des expériences de l'artiste. Par ailleurs, le plasticien a littéralement embobiné de fils de soie différents objets de son quotidien manufacturier. Savamment enroulés dans ce matériau noble aux couleurs éclatantes, des objets triviaux s’offrent à une contemplation inédite.